"Architecture et disjonction" - Bernard Tschumi - Sortie fin avril 2014
"Les textes réunis dans ce livre ont été écrits entre 1975 et 1991. Il semblait au jeune architecte que j’étais alors que, de manière paradoxale, si l’on voulait parler honnêtement d’architecture, il fallait pour commencer éviter d’en faire, car le dessin charriait dans l’inconscient de son auteur trop d’idées préconçues. Le mot même d’architecture me semblait suspect tant il était chargé d’histoire (et d’histoires). Je le remplaçai ainsi pendant quelques années par « espace », qui me semblait moins terni par un passé à la fois héroïque et discrédité. Discrédité ? Revenons aux années soixante-dix. Les remarquables découvertes du mouvement moderne, devenu l’idéologie dominante des écoles, des états et des multinationales, avaient non seulement engendré un carcan d’habitudes peu compatibles avec une nouvelle créativité du champ architectural, mais elles avaient surtout abouti à une considérable perte d’innocence et d’inventivité. Seule la « ville » semblait avoir gardé sa fraicheur, son excitation, sa densité. Stimulée par les dérives situationnistes, les événements de mai 68, les insurrections urbaines, le cinéma (Deux ou trois choses que je sais d’elle, de Godard) ou encore le beau livre d’Anatole Kopp, Ville et Révolution, la ville apparaissait comme le lieu où tout était possible. Quant à l’architecture elle-même, il semblait qu’il faille repartir de zéro, d’autant plus qu’une vague de fond passéiste et souvent réactionnaire arrivait alors, qui durerait jusqu’à la fin des années quatre-vingt..." Bernard Tschumi. Extrait de la préface "Architecture et disjonction" (avril 2014).
Télécharger la préface de l'édition française et l'introduction à la première édition.
Exposition "Bernard Tschumi" -* Centre Pompidou du 30 avril au 28 juillet 2014.